Stéphane Dangel, formateur et co-auteur du premier ouvrage en langue française sur le storytelling
eLearning-infos : Le storytelling, en quelques mots ?...
Stéphane Dangel : La traduction littérale est trompeuse : « raconter une histoire », « narration d'une histoire ». On a l'impression que cela concerne l'expression orale et écrite, la prise de parole. En réalité, l'interprétation de l'histoire à proprement parler compte pour très peu dans l'efficacité du storytelling : peut-être 10 à 20 %.
Dire qu'il s'agit d'une « mise en récit » me paraît plus fidèle, la clé étant dans la construction de l'histoire et le registre choisi pour mieux communiquer… Plutôt que d'asséner des faits en s’adressant à la seule raison, on cherche à les mettre en scène sous forme d'une histoire pour toucher à la fois la raison et le cœur. C'est bien plus efficace. Et c’est un retour aux sources : l'homme a toujours communiqué en utilisant des histoires.
eLI : Pouvez-vous donner des exemples d'applications illustrant la pertinence du storytelling ?
SD : Le terrain d'application le plus intéressant reste celui du management, pour faire passer des idées, persuader, influencer sans pour autant manipuler. Dans le cadre d’un audit, par exemple, les données que l’on recueille avec cette approche sont d'une richesse souvent plus importante qu’avec les méthodes habituelles : écouter, susciter des narrations d'histoires chez les salariés interviewés, plutôt que d’administrer le questionnaire classique.
Il en va de même lorsqu’il s’agit d’inspirer confiance, de promouvoir des valeurs ou de lancer un projet : quoi de plus « parlant », engageant que la narration d'événements vécus ou à vivre, d'exemples concrets et pertinents ? Cette démarche est la plupart du temps plus efficiente que la présentation de courbes et de chiffres dans un Powerpoint.
eLI : La France est-elle en avance ou en retard dans ce domaine ?
SD : En retard, sans aucun doute. Ce sont nos voisins anglo-saxons, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne en particulier, qui ont conçu, codifié, méthodiquement mis en œuvre le storytelling. Et ils continuent d'en être à l'avant-garde ! D'autres régions – la Scandinavie, les Pays-Bas par exemple - ont décidé de leur embrayer le pas. Il est vrai que la plupart des ressources de qualité portant sur le storytelling sont en langue anglaise… Ce qui ne facilite pas les choses : nous sommes ici encore en voie de développement du storytelling !
eLI : Le storytelling est-il compatible avec la formation à distance ?
SD : Le storytelling n’est pas une performance d’acteur devant un auditoire ! Construire une histoire, c'est faire acte de création, définir une architecture, concevoir un design… Toute chose qui sont au cœur de la conception pédagogique… De ce point de vue, je suis prêt à parier sur le rôle croissant du storytelling dans le domaine de la formation à distance. Comme une aide puissante, motivante, aux auteurs et aux apprenants.
eLI : Vous êtes vous-même formateur et auteur dans ce domaine ?
SD : J’interviens en effet dans plusieurs Business Schools ainsi que dans les entreprises, auprès de dirigeants. En équipe avec Jean-Marc Blancherie, spécialiste du Knowledge Management – on n’est pas loin du eLearning… – et co-auteur, avec moi, du premier guide pratique sur le storytelling... en langue française !
A l’origine de cet ouvrage, notre volonté de combler un vrai manque en offrant un mode opératoire aux managers francophones. Nous l'avons d'abord publié sous format e-book, avant de lancer la version papier. Nous y présentons les fondements, les bases et les techniques opérationnelles pour un usage aisé, dans le quotidien.
Pour en savoir plus : Storytelling, le livre - Stéphane Dangel et Jean-Marc Blancherie (Editions du Désir)
Propos recueillis par Michel Diaz